Quelques plâtrés de nouilles plus tard et c’est déjà le samedi soir. Nous nous retrouvons, Stéphane et Alain qui partent pour 2 tournées gratuites (le 30 km), Sophie B., Nathalie R., Pascal Bo., Ludovic et moi pour la course des enfants (le 15 km). Bonne ambiance habituelle, et échanges rassurés et rassurants de ceux qui n’ont même pas peur.
La météo est idéale, 8°C au départ (4° à l’arrivée des 30 bornards), il fait clair et sec. Le temps d’un échauffement, et c’est déjà le départ (ça me surprend à chaque fois comme cela arrive vite). Je ne sais pas si c’est le trop plein de pâtes, ou le bruit de l’orchestre, mais je pars avec une foulée allègre et me retrouve dans le groupe de 7 coureurs qui sont partis comme des furieux, façon départ de cross. Il est vrai que la stratégie de course est de se trouver en tête rapidement avant d’aborder le parcours qui est à 80% en « single trace », avec beaucoup de difficultés pour doubler.
Sentiment bizarre que de partir à une allure non académique. 2 km de plat dans la base de loisirs pour étaler le groupe des 200 coureurs avant les hostilités, et je me retrouve 7ème au pied de la 1ère butte. C’est très rare pour moi, voir irréel que de me trouver en train de gérer une position, et pourtant cela m’accompagnera toute la soirée. Les buttes s’enchaînent, je me sens bien malgré l’effort qui me met en limite de la zone rouge en permanence (toujours façon cross). Donc je gamberge et je me rappelle toutes les consignes de courses que j’ai reçues depuis que je cours sur la régulation de l’effort. Je le sais… et pourtant je continue. A ce rythme, je dois pouvoir tenir maximum 45’, donc je vais avoir un problème… La course continue. Et puis c’est la magie du ciel qui disparait et les reliefs qui deviennent monochromes : je m’enfonce dans la nuit. Instant magique et irréel, j’adore ! Je recule le plus tard possible l’allumage de ma frontale. Bon je ne suis pas là pour planer, je vais finir par épouser une racine, j’allume ma lampe et me voilà dans la course de nuit, seul avec une myriade de lucioles qui s’alignent au milieu de la bruyère. Ce sont les balises réfléchissantes installées par les organisateurs pour nous guider dans ces terres sauvages. Et le rythme de la course s’installe.
Dans les profondeurs de la nuit, soudain une voix amie m’encourage, je ne vois que sa frontale, mais son timbre ibérique est unique : Javier, au milieu de nulle part, est là.
Accompagné par 2 coureurs qui se sont engagés sur le 30, nous avançons toujours à cette cadence infernale en mode cycliste avec la rotation régulière du leader. Je fais le job en me disant que si moi je vais dans le mur sur le 15 km, alors mes 2 compagnons sont hors normes ! Finalement, l’un des 2 explosera au 11ème km, quant au second, il m’a trouvé trop lent et il est parti…
Contre toute attente, je vais soutenir la cadence jusqu’au bout (il faut que je revois mes fondamentaux), voilà les lumières de la base, un peu de bitume, l’euphorie de la fin, je déroule sans entendre le retour d’un collègue doublé 2 km plus tôt. Lorsque je prends conscience de son souffle sur ma nuque, la ligne est à 20 m…Trop tard, j’accélère, il
est lancé, il me passe sur la ligne ! Il sera 4ème au scratch, tant pis pour moi, c’est une erreur de débutant !
C’est fini, je suis sur mon nuage gavé d’endomorphine. Toute l’équipe arrive et en attendant Alain et Stéphane qui sont déjà repartis pour un tour, on profite, en attendant la prochaine.